Grace à l’aide
d’une écossaise habituée d’Udaipur et de ses environs, qui me rencarde sur une
guest-house, c’est Ziguouiguoui « Hélène et les garçons » qui vient
me chercher à la gare ; Chemise en Jean’s, boucles d’oreilles, cheveux
rasés et houpette longue, grosse moto, tout y est, je me sens tel johanna dans
les bras de cricri d’amour !!! Comme c’est la saison basse, Manish (c’est
son nom) a beaucoup de temps, et s’avère être un très bon guide. La ville est
paisible, avec ces lacs, son palais, les indiens sont fières de vous dire que
c’est la ville la plus romantique d’Inde. Peut être un peu trop touristique à
mon goût, beaucoup de boutiques de souvenirs, de resto et de guest-house. Mais
il s’en dégage toujours une spiritualité, des vaches sacrées à tous les coins
de rue et dans chaque conversation reviennent les notions de Karma, de
fatalité, de chances à saisir, les indiens sont loin d’appliquer notre bien
connue, procrastination, alors je passe mes journées à écouter toutes ces
histoires, ces philosophies de vie, à chaque rencontre sont lot de réflexions
sur la vie. A chaque balade, une nouvelle rencontre, un autre thé, une nouvelle
conversation, je ne me lasse pas de ce quotidien toujours différents, comme ils
disent, chaque jour est unique et ne reviendra pas.
Mariage Rajput - शादी राजपूत
Ma décision était
prise, après 10 jours, je devais quitter Udaipur, et comme toujours, c’est ce
moment que ziguouiguoui cricri d’amour a choisi pour m’inviter à un mariage.
Les indiens passent leur temps à me dire qu’il ne faut pas rater sa chance.
Donc pour une fois, je suis leur conseil, et décide que non, je ne raterais pas
l’occasion de participer à un mariage au rajasthan. Le Rajasthan est l’un de
ces endroits, encore très traditionnel où les mariages sont arrangés, les
hommes et les femmes séparés pendant la noce et le problème du mariage précoce
est prégnant. Dans mon cas, il s’agit de
la caste des rajput (guerriers), le mariage est effectivement arrangée mais les
protagonistes n’ont pas 14 ans comme dans certains cas de figures.
Nous arrivons donc dans le village,
ma présence est visiblement une surprise pour les invités, mais bonne surprise,
leur sens de l’hospitalité est inégalable, je me sens donc rapidement comme à
la maison !! Les regards que je décèle derrière tous ces voiles colorés
sont d’abord plein de curiosité mais très vite des dizaines de sourires
jaillissent. Ces femmes tirent sans cesse leur voile, pour cacher leur visage,
mes yeux scrutent, espérant apercevoir des parcelles de visages nus, je suis
vite conviée à m’asseoir au milieu de toutes, prenant part, le sourire aux
lèvres, à leurs chants, leurs danses. Beaucoup de joie de vivre et de
complicité émanent de tous ces rituels.
Pour me fondre dans le décor, j’avais
pris soin d’emprunter un sari à une amie de Manish. Le problème du sari, c’est
que pour une européenne, l’enfiler seule est mission impossible. Heureusement
15 femmes de la noce se font un plaisir de me prêter main forte. On est 15 dans
une pièce de 10m², il est 14h, il doit faire 38°C, j’ai ma bouée blanche à l’air (merci le sari), et des mains qui se
baladent sur mon corps, trop d’yeux qui me regardent, j’ai chaud, très chaud,
suis probablement écarlate, parfaitement à l’aise au milieu de ces inconnues.
Après les derniers conseils beauté, « tu devrais mettre tes cheveux comme
ça », « ah tu n’as pas de bijoux, mais pourquoi ?!! », on
finit par quitter la pièce. Ma sortie est digne de celle du princesse, je ne
rêve que d’une chose, partir me cacher dans un coin et fumer une clope. Mais
non, désormais indienne, il est temps d’aller danser, pas évident avec 6 m de
tissus autours du corps. Mon style bâton qui danse, ne passe pas inaperçu,
l’une des sœurs me prête donc une de ses robes rajput, plus adaptée pour se
mouvoir. Dans cette tenue, je me sens l’âme d’une rajput et me fond dans la
masse, les femmes sont au petit soin, je suis invitée dans tout les cercles,
sollicitée en permanence, les photos fusent, je deviens photographe officiel de
la noce. Je participe activement à tout les rituels, les chants, les danses,
les sketchs, le tartinage de corps avec une mixture à base de curcuma, la
session henné. Je suis aux anges, pour la première fois en Inde, je rencontre
des femmes, on ne parle pas la même langue mais ma face de clown et mes
capacités de psychomot, nous permettent de communiquer simplement. Plus le
temps passe et plus les femmes me dévoilent leur visage souriant, leurs bijoux
scintillants, me questionnent sur ma vie (mariée ?? enfants ??),
m’expliquent leur lien de parentés.
Les festivités touchent à leur fin, le 3ème jour, est le jour officiel du mariage, la procession, le temple, l’union des mariés, malheureusement dans cette famille (ou cette caste), les femmes ne sont pas autorisées à assister à cette cérémonie, jusqu’à présent la fête se passait dans la famille du marié, je n’avais pas encore eu l’occasion de voir la future femme, nous passons donc la journée entre femmes, à attendre l’arrivée des jeunes mariés.
Leur arrivée est loin d’être plein
de joie de vivre, la jeune femme vient d’être arrachée à sa famille, elle doit
désormais vivre avec une famille d’inconnue, elle semble encore très jeune, les
mariés s’étaient-ils déjà vu auparavant ?, beaucoup de mes questions
restent sans réponses. Après son arrivée, elle est vite emmenée dans une pièce,
entourée de quelques sœurs du marié, elle est à peine autorisée à parler. Quand
finalement, on m’invite à aller la saluer, mes sentiments sont confus, je la
trouve prostrée dans cette pièce sombre, j’ai cette étrange impression de venir
veiller une mourante. On me sollicite encore pour prendre une photo d’elle,
j’ai le sentiment que ce n’est pas son souhait, mais je m’exécute. Sur cette
photo tant de tristesse émane de ses yeux qu’on distingue à travers le voile.
Je quitte la pièce, trop d’émotions, j’ai besoin d’une clope, d’un petit coin
pour m’échapper, comprendre.
Puis encore quelques rituels,
l’empreinte de ses pieds, des dons des invités et la jeune femme disparaît à
nouveau, je n’aurais qu’une autre occasion de la croiser le lendemain avant mon
départ. La fête se finit sans elle, les chèvres ont été tuées pour l’occasion,
le repas est délicieux, mais la soirée moins festives que les précédentes.
Je finis par quitter cette famille,
avec des centaines d’invitations, officiellement intégrée à cette famille, mais
aucun moyen de les contacter, espérant seulement que le destin me permettra de
tous les revoir.
Pfffff emotions en
terre Rajput !!!